Les actualités dans la rubrique «Contexte» sont pas des fakes. Nous les publions pour vous informer des événements de la guerre d’information entre l’Ukraine et la Russie.

Lamberto Zannier, secrétaire général de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’organisation qui rassemble à la fois les pays occidentaux et les anciens pays de l’Union soviétique et qui est chargée decontrôler la mise en place des accords de Minsk sur l’Ukraine, a répondu aux questions du Monde, en marge de la conférence sur la sécurité de Munich qui s’achève dimanche 14 février.

Quelle est la situation sur le terrain dans l’est de l’Ukraine ?

Pas bonne. Les violations du cessez-le-feu sont systématiques et nos personnels se voient entravés dans leur liberté de mouvement, surtout à l’est. Nous avons du mal à atteindre les frontières et à voir réellement ce qui se passe.

D’où viennent ces violations ?

Les forces séparatistes procèdent à des exercices militaires assez systématiques. C’était encore le cas la nuit dernière entre Donetsk et la frontière. Ça a duré presque toute la nuit. Nous constatons par ailleurs que des armements lourds sont sortis des zones de dépôts et déployés près de la zone de contact. La situation est donc en train de se détériorer.

De quels moyens disposez-vous ?

Nous avons actuellement huit bases de patrouille près de la ligne de contact. Nous prévoyons d’en déployer trois autres. Il y a actuellement des négociations à Vienne pour prolonger notre mandat qui s’achève fin mars. Nous souhaitons le prolonger d’un an et passer de 700 à 800 personnes.

Les accords de Minsk 2 conclus il y a un an entre la Russie, l’Ukraine, la France et l’Allemagne ne sont donc pas respectés ?

Il reste beaucoup à faire pour leur mise en œuvre sur le terrain mais également pour organiser les élections comme prévu. Nous aidons beaucoup le gouvernement ukrainien sur le plan législatif mais c’est aux Ukrainiens de trouver les solutions nécessaires. Il faut également procéder à l’échange de prisonniers et à l’amnistie prévus dans les accords.

La perspective d’élections vous semble-t-elle réaliste ?

L’idée était de les tenir avant l’été. Sans progrès rapide, on n’y arrivera pas. L’agenda reste complexe. Il faut surtout essayer de rétablir le plein respect du cessez-le-feu.

A vous entendre, les séparatistes sont les principaux responsables de la situation actuelle ?

Dans la phase actuelle, les séparatistes sont plus compliqués. Ils ont même menacé physiquement nos représentants. Il faut plus de respect pour notre personnel.

Quelles sont vos relations avec le gouvernement ukrainien ?

Elles sont bonnes, en général. Mais lui aussi doit résoudre des problèmes importants, notamment l’organisation des élections dans le Donbass et la réforme constitutionnelle. Tout cela avance très lentement et le « blame game » actuel n’aide pas.

Dans son discours à Munich, le premier ministre russe Dimitri Medvedev a évoqué la crise qui menace la Moldavie. Quelle est la situation dans ce pays ?

La situation n’est pas facile, en raison d’un manque de progrès dans la mise en œuvre de réformes qui sont nécessaires. C’est un défi pour le gouvernement contesté par l’opposition. Celle-ci pousse à de nouvelles élections qu’elle pense pouvoir gagner. Le vrai défi est l’élection du nouveau président en mars.

Dimitri Medvedev a également évoqué un retour de la guerre froide. Le constatez-vous ?

J’essaie de ne pas employer cette expression. L’OSCE vient d’adopter de nouvelles mesures en faveur de la cyber-sécurité. Cela signifie qu’en ce qui concerne les défis globaux et la lutte contre le terrorisme, la communauté internationale est encore capable de parvenir à des accords. Mais la géopolitique est bel et bien là et certains éléments nous rappellent que la guerre froide est de retour.

Par Frédéric Lemaître

La source: Le Monde

Le photo: Lamberto Zannier par SERGEI GAPON / AFP