La lutte du réseau social Facebook face aux fakes se poursuit. Pendant des années, le chef de la compagnie a promis d’augmenter le nombre de modérateurs. Ee plus, Facebook a décidé de créer son propre contenu vidéo, et commence à réfléchir à un accès payant au service.

Ces derniers mois, après le grand scandale concernant réseau Facebook et sa relation commerciale avec la compagnie Cambridge Analytica, le réseau social a été obligé de se défendre contre les accusations de l’opinion publique par rapport à la violation de la vie privée des utilisateurs, ainsi que de l’utilisation de ces données par d’autres sociétés, poursuivant leurs propres objectifs. Depuis, le chef du réseau social Mark Zuckerberg a du faire une déposition au Congrès américain et s’est adressé au Parlement européen. Là, il a fait de nouvelles promesses à propos de sa lutte contre la manipulation de l’opinion publique.

Théoriquement, les déclarations de Zuckerberg restent proches de ses discours précédents. Sa rhétorique rappelle le style des déclarations des dirigeants d’un certain nombre de pays européens, que nous avons entendu en 2014-2015: il est préoccupé par la situation et il prendra des mesures appropriées. Pourtant, tous ceux qui s’intéressent à la longue histoire de la lutte du réseau social contre les fakes et les manipulations, réalisent certainement qu’ils ont déjà entendu le même genre de discours.

Qu’est-ce qui est changé ? Mark Zuckerberg a récemment recommencé à parler de la nécessité d’engager plus de modérateurs pour l’analyse du contenu. En outre, il a promis d’introduire un classement des éditeurs crédibles et est revenu sur le sujet de la vérification des identités des publicitaires. De plus, Facebook a rapporté qu’il s’agissait de préparatifs pour transformer le réseau social en une plate-forme de vidéo en ligne. Autrement dit, Facebook se prépare à devenir une véritable plate-forme média avec du contenu créé conformément à ses demandes. Une section Facebook Watch va remplacer la télévision et YouTube, mais Facebook s’efforce de garantir la «pureté» de son contenu.

Cet été diffère des autres étapes de la lutte contre les fakes et les bots. Cette fois-ci, Mark Zuckerberg est tombé sur un nouveau problème, auquel il a dû faire face. Il s’agit du vol des données des utilisateurs (cf. scandale concernant Cambridge Analytica) et la prévention de fuite de ce genre à l’avenir. Ainsi,  l’objectif devient difficile: la compagnie est obligée de présenter sa vision non seulement de comment elle compte lutter contre la diffusion de fakes et de publicités politiquement manipulatrices, mais elle doit aussi expliquer comment elle pense à protéger les données des utilisateurs et empêcher leurs utilisations à divers fins, y compris manipulatrices. Le réseau social répète ses déclarations à propos de faux contenu, mais comment compte-il faire face à ce nouveau problème ?

Ainsi, Facebook fait face à deux problèmes principaux, liés à l’utilisation «non documentée» de ses fonctions: la première consiste à la diffusion de fakes et à l’activité des bots, qui propagent de la fausse information sur la plateforme, et la seconde – c’est l’utilisation de données des utilisateurs à leur insu.

Deux urgences s’imposent :

  1. L’identification de faux contenu et son élimination, l’identification des bots et leur blocage, l’identification du contenu manipulateur. Cette dernière tâche est la plus difficile, car il est souvent impossible d’identifier à l’aide d’outils informatiques de tels messages et de les bloquer.
  2. Le blocage ou la réduction de l’accès aux données des utilisateurs pour éviter les manipulations. Dans ce cas-là, c’est la conséquence directe de l’affaire de Cambridge Analytica.

Dans les grandes lignes, il s’agit d’un gros problème en général: la manipulation de l’opinion des utilisateurs du réseau social, qui s’effectue à l’aide de différents moyens. Ce problème s’aggrave par le fait que les entreprises comme Cambridge Analytica exploitent l’idée fondatrice du réseau social et sa méthode principale de popularisation: renseigne-toi le mieux possible sur chaque utilisateur pour lui montrer ce qui l’intéresse et ce qu’il veut.

Jusqu’à présent, Zuckerberg et ses analystes n’ont pas trouvé la solution des problèmes décrits. Ils continuent à travailler sous le modèle d’interaction existant avec leurs clients (les utilisateurs et les publicitaires), et d’après le même modèle de monétisation. C’était probablement la raison de l’apparition de commentaires prudentes des représentants de Facebook au plus fort du scandale avec Cambridge Analytica, à propos de la possibilité de l’introduction d’un accès payant au réseau social, sans publicité ni utilisation des données des utilisateurs.

Les dispositions prises par Facebook et les déclarations de Zuckenberg changent un peu la rhétorique habituelle du réseau social : ils semblent dire aujourd’hui un peu plus que «nous regrettons et recrutons plus de modérateurs». Même si les dispositions déclarées ne peuvent pas être considérées comme celles qui vont résoudre le problème des fakes et des manipulations, nous avons décidé de présenter les changements qu’a mis en place le réseau social : dans ses algorithmes, ses principes de travail, ses méthodes d’affichage et dans ses modèles de monétisations.

L’identification de faux contenu

L’objectif de l’identification des fakes et des bots dans les conditions modernes est plus que difficile, parfois cela semble impossible. Malgré ça, l’équipe Facebook tente de lutter contre ces démons du Web. Voici les nouvelles annonces de Facebook pour avancer dans cette direction.

Les sources fiables et l’armée de modérateurs

Ce serait injuste de dire que Mark Zuckerberg ne se sent pas assez concerné par le problème des fake news. Il a déclaré qu’il est prêt à perdre de l’argent sur la publicité politique pour ne pas retomber dans le même piège qu’en 2016. Lors d’une réunion avec les managers d’un média intitulé «OTR» (abréviation de «off the record»), Zuckerberg a rapporté sa volonté de recruter des dizaines de milliers de modérateurs pour vérifier les publicités politiques et investir des «milliards» de dollars dans les outils nécessaires. «En réalité, nous nous apprêtons à perdre de l’argent qui provient des spots publicitaires de campagne», a-t-il dit. En outre, il a ajouté que la compagnie prévoit la création d’un outil d’auto-apprentissage basé sur l’intelligence artificielle pour aider dans cette analyse.

C’était annoncé lors d’une réunion en mai, et fin juin, déjà, Facebook a annoncé le lancement de l’outil d’apprentissage automatique pour identifier les fakes news, copiées et publiées par différents profils. Cet outil  cherche à faire une action préventive face à la menace de la publication des fake et tente de prédire quelles pages pourront reprendre le faux contenu.

Qui est-il – le commanditaire de la publicité politique?

Il y a une autre innovation intéressante – Facebook a déclaré mettre en place la vérification de l’identité des commanditaires de publicité politique. Il seront obligé de confirmer leur identité et leur localisation. La publication de leur publicité sans cette vérification sera interdite. En plus, le réseau social veut vérifier l’identité des modérateurs des grandes communautés et des pages populaires. Cette décision vise à lutter contre l’ingérence des structures russes dans les élections américaines. Selon Mark Zuckerberg, ces mesures vont compliquer de nouvelles tentatives d’ingérence russe dans les résultats des élections à venir à l’aide de faux comptes et pages. On suppose chez Facebook, à juste terme, que si cette fonction était disponible avant, les victimes de l’«Internet Research Agency » (la soi-disant «usine à trolls» russe) auraient été prévenu du contenu manipulateur des publicité et auraient pu voir que leur commanditaire était assez étrange.

Facebook devient un média

Récemment, Facebook a annoncé qu’il allait supprimer sa section très controversée « Facebook Trends » (disponibles pour les utilisateurs américains). Cette section est apparue pour la première fois en 2014, et a souvent fait l’objet de controverses. Au début, les rédacteurs étaient accusés de préférences politiques. Plus tard, il ont mis en place un algorithme qui  définissait le contenu de la section de discussion, en s’appuyant sur les sujets qui y étaient déjà dans le passé, et donc qui intéressaient les utilisateurs.

A présent, le géant des réseaux sociaux supprime complètement cette section. Pour la remplacer, le géant de l’informatique va lancer une nouvelle section nomée Today In, pour publier des nouvelles locales. Ils ont pour partenaires 80 éditeurs d’Amérique du Nord, d’Amérique du Sud, d’Europe, d’Inde et d’Australie qui vont réunir leurs efforts pour remplir la section.

Facebook promet de mettre en évidence visuellement les nouvelles locales pour stimuler les utilisateurs à les lire.

De plus, le réseau social prépare sa propre section avec des nouvelles vidéo – Facebook Watch. La compagnie positionne cette section comme une nouvelle plate-forme d’information avec du contenu de haute qualité en temps réel. Différents formats de contenu vidéo seront disponible sur le site – comme de la diffusion en direct et des émissions de télévision.

Les premiers débats télévisés seront diffusés cet été. Au moment du lancement, le service sera disponible que pour les utilisateurs d’Amérique du Nord.

Le lancement d’une section vidéo signifie que le réseau social se transforme en une plate-forme multimédia, dont le contenu sera plus facile à surveiller, du moins au début. Cette approche peut protéger les flux de vidéo de qualité contre le contenu douteux et, partiellement, contre la diffusion de fakes vidéo.

Blocage de l’accès aux données de l’utilisateur

Le réseau social a également annoncé quelques innovations liées au blocage de l’accès pour les applications. La compagnie a promis de vérifier le fonctionnement de chaque application qui demande l’autorisation d’accès aux informations privées des utilisateurs, à l’aide d’un réseau social. Facebook cherche à limiter la quantité de données envoyées aux serveurs des compagnies de l’extérieur.

En plus, Facebook envisage de limiter certaines fonctions de recherche, en particulier, la recherche par l’adresse postale ou par le numéro de téléphone.

Un accès payant à Facebook?

Au plus fort des discussions, pendant le scandale Cambridge Analytica, est apparue l’idée de l’introduction d’un accès payant au réseau social. La directrice exécutive de Facebook, Sheryl Sandberg, a déclaré cela dans une interview pour NBC. Le réseau social n’a pas fourni d’autres précisions.

Le lancement d’un accès payant au réseau social est le moyen le plus évident pour résoudre dles problème de fakes. Dans ce cas, on ne pourra pas montrer aux utilisateurs de publicités, ils ne liront que les nouvelles de pages qui les intéressent. Facebook n’aura plus besoin de baisser artificiellement la couverture des pages populaires, pour les encourager à acheter de la publicité. Cependant, cette approche ne garantit pas une protection complète contre le contenu douteux qu’on connaît malheureusement si bien chez StopFake. De plus, il est évident que le réseau social ne pourra pas couper complètement l’accès gratuit. L’introduction d’un accès payant, même à grande échelle, ne pourrait jamais compenser le revenu qui vient aujourd’hui de la publicité, qu’on montre actuellement aux 2 milliards d’utilisateurs du réseau social.

Par Nadezhda Balovsyak pour StopFake.org