Le texte des articles 106 et 107 de la Charte des Nations unies ne dit rien sur le droit de la Russie à intervenir militairement pour « éradiquer le nazisme ». De plus, les articles mentionnés datent d’une période transitoire et ne sont pas pertinents.

L’affirmation selon laquelle la charte de l’ONU permettrait à la Russie « d’appliquer toute mesure, pouvant aller jusqu’à l’intervention militaire, pour réprimer les actions visant à justifier le nazisme ou à revoir les résultats de la Seconde Guerre mondiale » circule sur les réseaux sociaux et les médias proches du Kremlin. Ces messages évoquent les articles 106 et 107 de la Charte des Nations unies. Parmi les pays répertoriés par la propagande comme ceux où la Russie « a le droit » d’intervenir avec son armée figure, bien évidemment, l’Ukraine.

Capture d’écran – politnavigator.net

Ce n’est pas la première fois que la Russie invoque la Charte des Nations unies pour manipuler l’opinion. Auparavant, la Fédération de Russie affirmait que les prétendus « référendums » dans les territoires temporairement occupés par l’Ukraine auraient été organisés conformément à la Charte des Nations unies, que la tenue même de la guerre en Ukraine était justifiée par la Charte des Nations unies et que le Donbass, la région de Kherson et Zaporizhia « ont le droit à l’autodétermination » en vertu de la Charte des Nations unies. StopFake a démenti ces faux et ces manipulations dans ses précédents articles.

Cette fois-ci, la propagande russe utilise les articles 106 et 107 pour affirmer que la Fédération de Russie, en tant que « vainqueur de la Seconde Guerre mondiale », peut « appliquer toute mesure, pouvant aller jusqu’à l’intervention militaire, à l’encontre des pays qui ont combattu contre elle, pour supprimer les actions visant à réviser les résultats de la guerre ». Avec cette notion, la Fédération de Russie fait également référence au « nazisme rampant » qui, selon le Kremlin, sévit actuellement en Ukraine. StopFake l’a réfuté dans un autre article sur l’Ukraine qui aurait besoin d’une « dénazification ».

La Charte des Nations unies a été signée le 26 juin 1945 à San Francisco lors de la Conférence des Nations unies. La Charte régit non seulement les activités de l’organisation dans le domaine de la sécurité internationale, mais sert également de code de conduite pour les pays dans les domaines politique, militaire, environnemental et humanitaire. Les articles de la charte auxquels les propagandistes font référence appartiennent au dernier chapitre : « Dispositions transitoires de sécurité », c’est-à-dire qu’ils remontent à la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. De plus, leurs textes ne disent rien sur le droit de la Russie d’intervenir militairement si cela est nécessaire pour « déraciner le nazisme ». La Russie, en tant qu’État, n’est devenue membre des Nations unies qu’en 1991. En outre, les experts juridiques notent que certains articles de la Charte sont déjà « morts » car ils ne se réfèrent qu’à cette période particulière de l’histoire, et parmi ces articles figure l’article 107 auquel la propagande russe se réfère.

Capture d’écran- un.org

En revanche, l’article 2 de la Charte des Nations unies souligne que les membres de l’ONU ne peuvent porter atteinte à l’intégrité territoriale ou à l’indépendance politique d’aucun État, un point que la Russie a violé de façon barbare en envahissant l’Ukraine. Le 2 mars 2022, au début de l’invasion totale du pays par la Russie, l‘Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution condamnant l’invasion et appelant la Russie à se retirer immédiatement d’Ukraine. La résolution a ensuite été soutenue par 141 pays et n’a été contrée que par cinq pays : la Russie, la Syrie, la Corée du Nord, le Belarus et l’Érythrée. En novembre 2022, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté un projet de résolution sur l’établissement d’un mécanisme de compensation pour l’Ukraine pour les dommages causés par la guerre de la Russie contre l’Ukraine.