Le fait que la Russie utilise le système de défense aérienne S-300 contre des cibles au sol est confirmé par les données du renseignement britannique. Les analystes militaires notent que ces missiles sol-sol manquent souvent leurs cibles, entraînant des pertes civiles. De plus, la capacité du système de défense aérienne S-300 à atteindre des cibles au sol est confirmée par les médias russes et biélorusses eux-mêmes.

Malgré les nombreuses preuves de crimes de guerre russes, certains internautes continuent de prétendre que les bombardements des infrastructures civiles des villes ukrainiennes proches de la ligne de front ne seraient rien d’autre que des “tirs infructueux de la DCA ukrainienne”, et que les déclarations de la partie ukrainienne sur la capacité des systèmes modernes russes de défense anti-aérienne S-300 de frapper des cibles au sol ne seraient que pure invention.

«Rappelez-vous. Tout ce qu’on nous fait passer pour des « frappes ennemies à coup de missiles S-300 », ce sont les tirs infructueux de notre DCA. Avec l’intensification des hostilités, le nombre de frappes de ce type va augmenter », écrit l’un des internautes.

Capture d’écran – facebook.com

Et pourtant, en juillet déjà, le chef de l’administration régionale de Mykolaïv, Vitaly Kym, avait déclaré que la Russie utilisait des missiles sol-air à longue portée S-300 pour attaquer des cibles au sol à Mykolaïv. « Ils modifient les missiles S-300 en les équipant d’un GPS pour tirer au sol », écrit Kym sur sa chaîne Telegram.

Depuis juillet 2022, les soldats russes bombardent systématiquement les villes ukrainiennes situées en première ligne comme Mykolaïv, Zaporijjia, Kharkiv, avec des missiles anti-aériens S-300, mais en les modifiant pour en faire des missiles “sol-sol”. Les autorités ukrainiennes l’ont indiqué à plusieurs reprises déjà. Bien qu’à ce jour il n’y ait pas de données officielles d’ordre tactique ou technique sur ces S-300 modifiés, leur utilisation est confirmée par de nombreuses sources d’information.

Les médias biélorusses écrivaient dès 2011 que leurs S-300 étaient capables de détruire des cibles terrestres à 120 kilomètres de leurs positions de tir. Il est probable que la possibilité de toucher des cibles terrestres fixes ait été initialement prévue par les développeurs lors de la conception du système de défense anti-aérienne adopté en 1979, ainsi que lors de toutes ses modifications ultérieures. L’auteur de la publication note que la capacité à détruire des cibles au sol est limitée par le système de guidage, et non par le système de propulsion. Néanmoins, durant l’époque soviétique, il est probable qu’en raison de son coût élevé, le tir de missiles anti-aériens sur des cibles au sol n’était pas pratiqué.

Dans son article sur le sujet, l’analyste militaire Thomas Newdick écrit que ces dernières années, la Russie a modernisé ses systèmes S-300, ce qui leur a probablement permis de tester ces systèmes de défense anti-aérienne dans le rôle « d’attaque au sol ». Il fait remarquer que les médias russes avaient annoncé en 2011 déjà que les régiments de l’armée de terre et de la DCA de la région militaire orientale avaient organisé des manoeuvres au cours desquelles cinq missiles S-300 avaient été lancés en simulation contre une “formation armée inconnue”, qui fut complètement détruite.

Il note qu’en l’état actuel des choses, on ne peut pas savoir avec certitude si la Russie a vraiment pu moderniser ses S-300 avec des guidages par GPS et si elle les utilise pour des frappes terrestres. Cependant, « cela semble tout à fait possible et aurait du sens étant donné l’épuisement des stocks d’autres armes plus appropriées ».

De plus, à la fin du mois de juillet, le renseignement militaire britannique a confirmé que l’armée russe utilisait les systèmes soviétiques de défense anti-aérienne S-300 pour frapper des cibles terrestres en Ukraine. “La Russie a augmenté l’utilisation de missiles anti-aériens en mode d’attaque secondaire contre des cibles au sol en raison d’une pénurie aiguë de missiles spécialisés pour les attaques au sol”, selon la déclaration. Auparavant, le Pentagone avait également déclaré que la Russie était probablement à court de stocks de missiles de croisière plus modernes pour les attaques au sol.

Capture d’écran – twitter.com/DefenceHQ

L’analyste militaire de McKenzie Intelligence Services Louisa Jones tend elle aussi à considérer que la Russie retouche ses S-300 parce qu’elle n’aura bientôt plus de missiles de précision. “Je suis persuadée qu’ils ont épuisé leurs réserves, regardé quelle était leur capacité d’en produire plus… et se sont rendus à l’évidence que le meilleur moyen d’y parvenir était de modifier des missiles tels que les S-300”, déclare-t-elle dans un commentaire à la BBC.

Thomas Newdick suppose que l’utilisation du S-300 contre des cibles terrestres peut être justifiée par des considérations pratiques. « Si une cible apparaît hors de portée de l’artillerie régulière et que la batterie de défense anti-aérienne S-300 est à portée de main, il peut être judicieux de la frapper avec ce moyen, et non avec des missiles de croisière plus coûteux », explique l’analyste militaire.

Au Institut for the Study of War (USA), on remarque que l’utilisation par la Russie de S-300 pour des attaques au sol ne se révèle pas efficace car ces missiles ont été initialement prévus pour détruire des cibles aériennes. Dans le même temps, le ministère britannique de la Défense suppose que les missiles « modernisés » n’atteignent pas les cibles prévues, ce qui entraîne des pertes civiles.

Quant à la déclaration selon laquelle les frappes contre les infrastructures civiles seraient le résultat de “lancements infructueux de la DCA ukrainienne”, elle est totalement infondée. Dans son commentaire à la BBC, le collaborateur du Centre for Strategic and International Studies (USA) Ian Williams assure qu’il «n’y a rien qui prouve que les systèmes ukrainiens ont eu des ratés lors des récentes attaques». De même que sont peu probables les prétendus déploiements de systèmes anti-aériens ukrainiens dans les centre-villes.

Précédemment, StopFake avait réfuté à plusieurs reprises des mensonges similaires dans ses articles: “Intox: Un immeuble résidentiel à Kyïv situé sur l’avenue Lobanovski a été détruit par un missile anti-aérien ukrainien”, “Intox: Ce n’est pas un missile russe qui est tombé sur l’immeuble d’Odessa, mais les éclats d’un missile anti-aérien ukrainien”, “Intox: Les soldats ukrainiens tentent de dissimuler les traces d’une interception manquée de missile au-dessus de Vynnytsia”.