Par: Alexandra Brzozowski | EURACTIV.com | translated by Marion Candau

Illustration: EURACTIV [Shutterstcok]
Le Parlement européen vient d’adopter une résolution contre la désinformation programmée. Il pointe notamment du doigt la Russie, la Chine, l’Iran et la Corée du Nord.

Les eurodéputés ont adopté le 13 mars une résolution, par 489 voix contre 148 voix contre et 30 abstentions, qui condamne fermement les «actions de plus en plus agressives» à l’encontre des pays européens et du voisinage de l’UE.

Les eurodéputés veulent surtout «alerter l’opinion publique sur les campagnes de désinformation russes, qui constituent la principale source de désinformation d’Europe.»

La résolution a été rédigée par l’eurodéputée polonaise Anna Fotyga (Conservateurs et réformistes européens) qui préside la sous-commission parlementaire sur la sécurité et la défense.

Elle appelle l’UE à mieux se concentrer sur la propagande hostile «qui a pour but de fragiliser les fondations et les principes des démocraties européennes, ainsi que la souveraineté de tous les pays du partenariat oriental.»

La position a été adoptée le jour où une étude majeure a été publiée par le groupe de la société civile Avaaz, affirmant que les fake news ayant circulé sur le mouvement des gilets jaunes ont atteint plus de 105 millions de vues sur Facebook.

«Plus de 100 millions de vues pour les fake news, c’est énorme. Ce chiffre montre à quel point le mouvement des gilets jaunes a été infesté par la désinformation», a déclaré Christoph Schott, directeur de campagne chez Avaaz. «Il faut tirer les sonnettes d’alarme partout en Europe tout de suite. Les élections européennes approchent et seront le test ultime pour les systèmes immunitaires de nos démocraties.»

Une force spéciale sur la désinformation a été mise sur pied en 2015 par le Service européen d’action extérieure de la Commission européenne et a pour but de contrer la désinformation russe.

Le service East StratCom n’est toutefois doté que de 15 employés et dans son rapport, Anna Fotyga souhaite le transformer en une unité à part entière. Cela permettrait de «susciter une prise de conscience face aux campagnes de désinformation de la Russie, principale source de désinformation en Europe.»

5000 cas de désinformation sur l’UE en 4 ans

Depuis qu’elle fonctionne, la East StratCom a débusqué plus de 5 000 cas de désinformation sur plusieurs sujets, selon les propres statistiques du groupe de travail. Mais pour les eurodéputés, le groupe doit couvrir un plus grand éventail de sources d’information et de langues.

Un système d’alerte rapide permettant un échange rapide d’informations sera lancé la semaine prochaine, ce qui permettra une réponse européenne plus forte aux menaces hybrides.

Après le vote, Anna Fotyga a déclaré que l’UE «ne peut plus nier le fait que nos institutions et sociétés sont la cible de la propagande hostile du Kremlin, qui fait partie d’une stratégie plus large.»

«Notre réaction dépend aussi de la résilience des sociétés, de la transparence des médias et de leur capacité sociétés résilientes, de médias transparents et de leur manière d’encourager le pluralisme, le tout en prenant des mesures pour éviter la censure», a expliqué l’eurodéputée polonaise.

La résolution encourage aussi tous les pays européens à évaluer la situation sur leur territoire et à «reconnaître la nécessité imminente d’une orientation stratégique pour répondre à la guerre de l’information hostile.»

«Nous avons mis l’accent sur la nécessité de maintenir la liberté d’expression et la liberté des médias tout en luttant contre la propagande hostile et la désinformation, et sur le rôle des médias indépendants et le journalisme de qualité», a déclaré l’eurodéputée à ses collègues en séance plénière.

Nouvelles règles sur la campagne politique

Dans un vote du 12 mars, le Parlement européen a aussi adopté de nouvelles règles sur les campagnes politiques pour protéger les élections européennes de mai 2019 de l’utilisation abusive de données.

La nouvelle règlementation, adoptée par 586 voix pour, 55 contre et 24 abstentions, a pour vocation d’imposer des sanctions financières aux partis politiques pan-européens qui utiliseraient de manière illégale et délibérée des données personnelles à des fins électorales.

L’Autorité pour les partis politiques européens et les fondations européennes aura la responsabilité d’imposer des sanctions, qui pourraient représenter un pourcentage de leur budget annuel ainsi que leur exclusion des financements européens.

Les eurodéputés appellent aussi à légiférer sur les entreprises de médias sociaux, les services de messagerie et les fournisseurs de moteurs de recherche, mais mettent aussi en garde contre la menace de la censure. Pour eux, la décision de bloquer des comptes sur les réseaux sociaux doit être justifiée par la loi et effectuée de manière transparente, en coopération avec la société civile.

La nouvelle règlementation tire entre autres son inspiration du scandale impliquant Facebook et Cambridge Analytica, qui ont collecté les données personnelles de millions d’utilisateurs sans leur consentement durant la campagne pour le Brexit.

«Les nouvelles dispositions visent à protéger le processus électoral des campagnes de désinformation en ligne basées sur l’utilisation illégale des données des électeurs. Je suis heureuse que nous ayons avancé sur ce dossier de manière si efficace», estime Danuta Maria Hübner (PPE), présidente de la commission parlementaire des affaires étrangères (AFCO).

La résolution du Parlement vise aussi à garantir une plus grande transparence de la propriété des médias, et assure que plus d’efforts sont nécessaire pour évaluer précisément les sources de la désinformation.

Par: Alexandra Brzozowski

Source: EURACTIV.com | translated by Marion Candau